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jeudi 23 février 2017

Les décrottoirs, encore un témoignage des us et coutumes de notre histoire

Flâner dans Paris est toujours une bonne habitude.

Flâner, rappelons-le, signifie marcher sans but, se laisser porter au gré du hasard, par ses pas juste pour le plaisir de regarder.
Autrement dit "courir ça et là", "agir sans se hâter", "perdre son temps", selon la définition faite en 1986 par l'Académie Française...

Pourtant, je trouve que flâner permet d'en apprendre bien plus que ce que l'on pense. S'il y a apprentissage, c'est qu'il n'y a donc pas de perte de temps, n'est-ce pas ?

C'est en me promenant dans les rues de Paris que je me suis arrêtée un jour devant ceci.


Faisant parti du paysage, je n'y avais guère fait attention, avant l'autre jour, où j'ai vu un homme s'en servir. Après avoir marché dans une crotte de chien, je le vois racler ses chaussures sur cette barre de fer... et ça tombe plutôt bien puisque cette chose, disposée encore à l'entrée de certains immeubles, se nomme un décrottoir.

Remplacé il y a quelques temps maintenant par nos paillassons, le décrottoir avait toute son utilité dans le Paris d'antan.

A une époque lointaine, Paris n'était que chemins boueux, marécageux... On s'y promenait en calèche, à cheval, à pieds circulant ainsi entre les crottins, la boue, les ordures et les eaux usées.

Il semblerait que ces décrottoirs soient nés en même temps que les trottoirs, c'est-à-dire vers la fin du XVIIIe siècle.

Le premier trottoir de Paris fut installé en 1781 dans la rue de l'Odéon.

Au fil du temps, les trottoirs furent usités plus fréquemment, ce qui rendit nécessaire leur construction un peu partout. Ceux-ci ressemblaient d'ailleurs plus à des seuils de porte qu'à nos larges trottoirs d'aujourd'hui.

Afin de garder les trottoirs un peu plus propres et surtout pouvoir rentrer dans les immeubles sans mettre de la boue partout, on se décrottait les chaussures avec ces merveilles (c'était même inscrit dans d'anciens manuels d'éducation pour enfants) :


Pourtant vers 1835, le choléra fait rage... l'urgence sanitaire fait que la ville doit mettre en place des moyens importants pour assainir ses rues.

Les fossés sont remplacés par des fosses sceptiques qui sont elles-mêmes vidangées de plus en plus régulièrement (on amenait le tout dans des décharges éloignées de la ville comme à Montfaucon, vers l'actuelle place du Colonel Fabien par exemple, qui n'était pas encore rattrapée et engloutie par la Capitale).
Les pavés apparaissent petit à petit, les moyens de transport changent, les crottins disparaissent ainsi que la boue,...

Les décrottoirs deviennent de plus en plus inutiles et occupent aujourd'hui une place de figuration.

D'ailleurs, j'ai retrouvé un extrait relatant les législations concernant les décrottoirs (en bas de la page 683) dans le Dictionnaire Historique de Paris paru en 1828.


Et plus tard, quand le décrottoir n'eût plus d'utilité, naquit la coutume du paillasson.

Ces décrottoirs, vous n'en trouvez pas qu'à Paris, comme en témoigne cette page internet relatant les décrottoirs d'Aix-En-Provence ou encore celle-ci qui en recense quelques uns un peu partout en France.


Le Bonus du jour :

Comme en témoigne une exposition belge de clichés photographiques de Christophe Hollemans sur le sujet, l'instrument jouissait d'un si grand succès qu'ils prirent d'innombrables formes et furent conçut dans des matériaux eux aussi tout aussi variés.

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