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vendredi 17 février 2017

Barbès et ses trésors d'Histoire : les Grands Magasins Dufayel

Je voudrais vous parler d'un endroit situé entre les deux quartiers les plus dévastés de Paris.

Cet endroit ne ressemble à aucun autre, c'est un des derniers quartiers résistants du Paris populaire jusqu'à il y a peu de temps.

Je voudrais vous parler du boulevard Barbès situé au Centre-Nord de la Capitale.


Il est le boulevard au centre du XVIIIème arrondissement, entre le quartier de la Goutte d'Or et celui de Clignancourt (où il se situe dans sa majeure partie). C'est celui qui mène tout droit vers la Porte de Clignancourt et son marché et le département de la Seine Saint-Denis à Saint-Ouen où se trouve également le marché aux Puces.


Longtemps, ce quartier à jouit d'une très mauvaise réputation allant jusqu'à faire parler nos politiciens dont Jacques Chirac qui, après une visite en 1991, expliqua lors d'un dîner-débat du RPR, que dans ce quartier il y avait "le bruit et l'odeur"....

Le quartier longtemps rejeté par beaucoup de parisiens fut, il y a peu de temps, sujet à débats. Avec les nouveaux projets de rénovation de la Mairie de Paris, le quartier a subit nombre de destructions d'immeubles, qui, il est vrai, étaient dans un état de vétusté que nul ne pouvait ignorer. Ainsi, au coin des Boulevards Barbès et Rochechouart, furent reconstruits des bâtiments dont un qui causa la polémique. Une brasserie installée juste en face de la fameuse enseigne Tati.


Ici, une circulation bouchée accompagnée d'une symphonie de klaxons des plus insupportables, causant des incivilités entre les scooters, les vélos, les voitures et les transports publics qui aurait put justifier le ballet des policiers essayant de rétablir l'ordre dans la circulation. Les piétons extrêmement nombreux, tenant à peine sur les trottoirs, les conduisaient à faire preuve d'indiscipline... vu de l'extérieur, on aurait pu parler de ce carrefour comme d'une jungle.

L'habitude était aux marchés contenant mille et unes saveurs et un panel indéfinissable composé de milliers de couleurs. Les cafés étaient peu chers (les moins chers de la capitale) jusqu'à ce que s'installe une brasserie de quatre étages, flambant neuve avec des prix moins attractifs que ceux connus dans le quartier jusqu'alors.

Sa présence fit des émules et l'on commença à crier que Paris se gentrifiait et qu'il était déjà trop tard.

Paris est une ville qui connait la gentrification depuis sa naissance. De tous temps la ville s'est modifiée, a changé aux détriments des plus modestes, c'est un fait.

Pourtant, il parait que Paris reprend toujours ce qu'elle donne.

Le quartier n'a pas toujours été ainsi.

Il y a moins de deux siècles, Montmartre n'est que maquis, moulins et abris de fortunes.

Le projet est d'agrandir Paris. En 1844, Montmartre fait toujours partie de la banlieue de Paris, c'est la Commune de Montmartre, installée sur toute la Butte jusqu'à Pigalle ou plus bas (c'est selon chaque historien). Le versant Est de la Butte se transforme, on y construit des ruelles qui seront larges de 12 mètres au maximum.

Suite au décret du 9 Février 1859, Napoléon III agrandit les limites de Paris définies en 1860.

La première partie du boulevard Barbès vit le jour en 1863, c'était le plus large du quartier : 30 mètres.
Il s'étendit petit à petit dans le cadre des travaux d'Haussmann, portant ainsi le nom de boulevard Ornano puis celui de Barbès à partir de 1892 en l'honneur d'Armand Barbès, politicien français.

C'est un quartier en pleine expansion qui voit le tout Paris s'y précipiter...

Hé oui !

Pour connaître l'origine de cette fréquentation, il faut remonter en 1856.


Je vous avais parlé de la naissance d'un véritable temple de la mode sur la Rive Gauche... La Rive Droite ne fut pas en reste non plus.
Le succès du quartier, ses habitants d'un Paris révolu, le doivent à un certain Jean-François Crespin.

En 1856, il ouvre le "Palais des Nouveautés".


A son décès en 1888, le magasin connaissait déjà un franc succès, un de ses employés, Monsieur Georges Dufayel, reprit sa direction avec la ferme intention de l'agrandir.

C'est la naissance des Grands Magasins Dufayel, un magasin qui vise les classes populaires (les plus nombreuses à cette époque dans la Capitale).


Il ne tarda pas à aménager un théâtre, un cinématographe, une piste cyclable et même un jardin d'Hiver dans lequel les clients et les badauds se précipitaient pour se promener au milieu des plantes exotiques.


Il instaura un système d'achat nouveau : les clients achèterons désormais à crédit.
A la fin de chaque mois, il chargeait des encaisseurs de se déplacer aux domiciles des clients pour récupérer son dût. Pour ses clients les plus importants, il lui arrivait même de se rendre en personne à leurs domiciles.

Le théâtre eut son importance. Un orchestre classique s'y représentait.
Dans cet orchestre ? Des artistes de l'Opéra.
Le lieux gagnait en prestige.


A partir de 1900, lors des soirs de spectacles, on pouvait observer une lumière électrique émanant de la somptueuse entrée monumentale qui se trouvait au numéro 26 de la rue de Clignancourt. La lumière projeté dans le ciel était si puissante qu'elle était visible au dessus des toits de la ville.


Les bâtiments s'agrandirent jusqu'à occuper la totalité de l'îlot.
Ils furent édifiés par les architectes Le Bègue (Père  Fils) et Gustave Rives.


On doit le magnifique fronton de l'entrée principale à Jules Dalou et Alexandre Falguière.



En 1910, Dufayel décide de la construction de deux dômes situés aux angles des rues Sofia et Christiani, encore visibles aujourd'hui depuis le boulevard Barbès.


Le succès grandit encore... Les Grands Magasins Dufayel se prétendaient être les plus grands du monde. Ils comptaient environ 15 000 employés et pas moins de 400 succursales.

Pourtant, Dufayel ayant une vie assez agitée, décida de mettre fin à ses jours en 1916.

Le déclin gagna progressivement l'enseigne jusqu'à provoquer sa fermeture définitive en 1930.


Lors de la Libération, la BNP racheta l'essentiel des lieux. Le dôme principal fut détruit.
C'est en 1990 qu'une partie des bâtiments fut cédée pour être réhabilitée en logements mis à disposition en 2002. La BNP est toujours là, les logements aussi, on y trouve également l'enseigne Gibert Joseph et quelques troquets.

Ce quartier est un de ceux qui a le plus souffert mais il est en constante évolution, c'est un des plus vivants et vibrants de la Capitale.
Croyez moi, des trésors de toutes les époques confondues s'y cachent.

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