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mercredi 7 décembre 2016

L'avenue Frochot, cette voie à laisser dans "sa" tranquilité

Quand on se promène dans les rues de Paris, le plus fabuleux se cache souvent derrière les portes.
Face à un bâtiment d'apparence vétuste, une grosse porte ancienne perdant sa peinture, on pense souvent à tord qu'on ne peut retirer aucune bonne expérience à s'y aventurer.
Et bien, on a le droit de se tromper... mais on a aussi le droit de pousser la porte.

Des trésors de petits jardinets ont souvent été aménagés dans des cours intérieures dont la présence nous échappe la plupart du temps.

C'est le cas de cette grosse grille verte...

Evidemment, afin de respecter la tranquillité des lieux déjà bien perturbés, je vous invite à faire le tour pour pouvoir apercevoir, depuis une autre grille, un lieu chargé d'histoire.


Ici, une voie privée.
A l'entrée, un concierge tenu de garder le lieu loin des indiscrets : l'avenue Frochot.

Contrairement à son nom, on pourrait plutôt parler de cité, ou, comme on aime à le dire, la Villa Frochot.
Une villa est une ruelle, une impasse bordée de maisons (ce que l'on appelle également hameau ou quartier privé).

Cette voie fut ouverte en 1830.

Elle porte le nom de Nicolas Frochot, préfet de Seine chargé de l'achat de terrains hors du Paris de l'époque sous la gouvernance de Napoléon 1er (il acheta des terrains pour les aménager en cimetières).

Les maisons aux numéros 1,2 et 3 dateraient du percement de l'avenue.
Les styles architecturaux sont variés. On passe du style néo-gothique au style colonial en passant par du baroque, du flamant ou encore de l'Art Nouveau.

Aujourd'hui habitée par de richissimes personnalités (acteurs, peintres,...), cette villa n'est accessible que sur invitation.

Mais nombre d'artiste y ont séjourné, habité, travaillé.

Au numéro 3, la cantatrice Régine Crespin y habita jusqu'à son décès en 2007.
Le numéro 4 aurait été habité par une salonnière du nom d'Apollonie Sabatier. Elle recevait régulièrement de la visite...
Le numéro 5 aurait vu séjourner Victor Hugo (incontestablement l'un des plus remarquables écrivains) en 1870 à son retour d'exil dans la maison appartenant à Paul Meurice romancier et dramaturge).
Au numéro 6, Henri Guinier (peintre) avait aménagé son atelier et Django Rheinhardt (guitariste, jazzman) y habitait et brûlait ses meubles en hiver pour se réchauffer.
Au numéro 7 demeurait Charles Lamoureux (violoniste et chef-d'orchestre). Le père d'Alexandre-Dumas y aurait également habité.
Au numéro 8 se trouvait la maison d'Eugène Brieux (auteur dramatique et journaliste).
Au numéro 13, Paul Merwart (peintre) avait installé son atelier.


Au numéro 15, le grand Toulouse-Lautrec (peintre) y demeurait en plus d'avoir aménagé un coin atelier... son atelier de nu.
Il semblerait qu'au numéro 16, Patrick Hernandez (auteur, compositeur et interprète) y ait écrit sa célèbre chanson "Born to be alive" en 1974-1975.
Au numéro 26 Théodore Chassériau (peintre) avait installé son atelier.

On dit également que Jules Dupré (peintre) eut son atelier en 1839 dans l'Avenue Frochot (attention, j'ai aussi lu qu'il habitait dans une rue derrière, la rue Bréda aujourd'hui la rue Henry-Monnier) ainsi que Jeanne Samary (actrice) qui servait souvent de modèle à son voisin Pierre-Auguste Renoir (peintre) qui logeait non loin de là, au 7 avenue Frochot, avec ses 3 fils.

La Rêverie - Auguste Renoir
(portrait de Jeanne Samary)

On sait que Paris est chargé d'histoires et le Manoir de Paris ne détient pas le monopole de l'horreur.

Cette avenue si tranquille a déjà fait parler d'elle dans la littérature.

Il est aisé de se souvenir des histoires de Fantômas. L'un de ses premiers méfaits connus a été réalisé dans la cité Frochot (lorsque le commissaire Juve et le journaliste Fandor s'installèrent discrètement chez le Docteur Chaleck, cité Frochot, en poste d'observation suite à l'assassinat sauvage d'une voisine).

Voici d'ailleurs une vidéo réalisée en 1913, perle du cinéma muet retraçant les histoires de Juve contre Fantômas.



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Dans les faits, il y a une maison qui a fait beaucoup parler d'elle.

L'hôtel particulier, au numéro 1, de style néo-gothique, probablement construit à l'ouverture de la voie (certains parlent même de 1823). Elle détient un petit jardinet et, comme toutes les maisons de l'avenue, une grille à l'entrée (en plus de celle à l'entrée de l'avenue).

Cette maison a une histoire et une étiquette particulière. Il paraîtrait qu'elle est hantée.

Son histoire est bien triste. Elle commence avec Victor Massé, compositeur.
A l'époque, il acquiert la maison. Atteint de la maladie de Charcot, il resta paralysé un long moment au lit avant d'y décéder en 1884.

Le directeur des Folies Bergères acquis alors la maison.
A sa mort, c'est sa femme de ménage qui hérita du numéro 1.
Quelques temps plus tard, elle fut sauvagement assassinée dans les escaliers de cette maison à coups de tisonnier. Le meurtrier ne fut jamais retrouvé (je cherche encore les archives de presse...).

Suite à cette horrible tragédie, la maison fut laissée à l'abandon pendant près de 30 ans jusqu'à ce que Sylvie Vartan décide d'acheter l'hôtel particulier à la fin des années 1970, mais n'y habita jamais vraiment. L'histoire dit qu'elle s'est enfuit de la maison en courant...

On raconte que des cris retentissent dans la maison à la nuit tombée.
Certains disent que le meurtrier n'ayant jamais été retrouvé, l'âme de la femme errerait encore dans la maison et que celle-ci crierait chaque nuit.

Suite à cette affaire, c'est Matthieu Galey, critique de théâtre, qui se risqua en 1978 à posséder ce bien qui, soit disant, porterait malheur...
Dans son journal il aurait noté qu'en achetant la maison Frochot il "Aurait l'impression de m'endetter pour acheter mon tombeau gothique"...

Visionnaire ? Superstitieux ?

Quoiqu'il en soit, après quelques années d'occupation, il tomba malade et mourut... de la maladie de Charcot (tout comme Victor Massé).

Certains y voient un étrange lien, la maison serait maléfique.

Deux vieilles soeurs y auraient habité et auraient été assassinées au gourdin !

Il semblerait aussi que Patrick de Brou de Laurière ait été conquis par la maison. Il était, aux dires de certains, adepte de magie et aurait fait exorciser sa maison par un ami curé.

A son décès, la maison fut rachetée. Les nouveaux propriétaires disent ne jamais avoir assisté à de tels phénomènes.


Pour le bien de ses habitants, merci de rester à l'extérieur :-)

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