Parmi ces clochards vivant de la charité publique, un ancien
Préfet de l’Eure, un dénommé Eugène Cochet.
Il n’était pas rare de l’y croiser. L’homme déambulait
frénétiquement au milieu des allées, vêtu d’une redingote misérable, le cheveu hirsute,
arborant fièrement une serviette de cuir débordant de mille papiers … des
poèmes parait-il.
Oui, l’ancien préfet se présentait comme étant un poète.
Tout au long de ses balades, il s’indignait de n’avoir reçu
aucune médaille.
Bien connu des étudiants du quartier latin qui fréquentaient
régulièrement le jardin, il était plutôt vu comme un pauvre homme ayant perdu
la raison. D’ailleurs, ces mêmes étudiants se jouaient régulièrement de lui
jusqu’à la blague ultime qui emporta les derniers espoirs d’Eugène Cochet en
même temps que sa vie.
Un jour, souhaitant s’amuser de la situation pénible et des
plaintes de l’homme, les étudiants organisèrent une célébration « en son
honneur », au nom du peuple de France.
Ils le couronnèrent de divers prix, lui décernant pas moins d’une
dizaine de médailles sous des prétextes toujours plus farfelus les uns que les
autres. Cochet se vit décerner les médailles de l’Ordre de la Jarretière, de l’Eléphant
Vert, le Mérite Agricole, la cravate de commandeur de la Légion d’Honneur, …
Ce fut le canular le trop. Le pauvre homme tellement ravi de
voir son souhait exhaussé, se vit défiler dans tout le jardin dans une tenue
pour le moins humiliante.
Aveuglé par sa joie débordante, il se pavanait au Luxembourg,
cravate rouge et éléphant suspendus à son cou, jarretière au mollet.
Le pauvre homme, visiblement envahi par la folie, fut arrêté
par les gardes du jardin et embarqué à
l’Hôpital Psychiatrique de Sainte Anne.
Il eut le temps d’y séjourner seulement 8 jours, le temps d’y
pousser son dernier soupir…
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire