A la frontière de l’ancien village de Belleville encore en
dehors de Paris, la zone est habitée essentiellement par de pauvres gens vivant
dans la misère.
Autour de la place, dans les rues d’Allemagne (actuelle
avenue Jean-Jaurès), de Flandre et de Reberel, on recueille les indigents. Les
environs sont sales et des odeurs nauséabondes émanent des différents lieux de
décharges d’ordures improvisés par les habitants et du Gibet de Montfaucon où
sont pendus des corps d’anciens condamnés à mort en voie de putréfaction.
Nous sommes à la frontière de Paris, proche de la barrière
du Combat (ou barrière Saint-Louis), une des portes du Mur des Fermiers
Généraux.
Dès 1778, la place prend le nom de Place du Combat.
La raison est simple : sur la place, un forain dispose
une arène et des barrières de bois qui entourent la piste, ce qui permet aux
spectateurs d’être protégés.
Protégés, il le fallait car ce forain eu une idée plutôt
macabre… proposer des spectacles mettant en scène des animaux domestiques
contre des animaux sauvages.
Les combats opposaient des chiens ou des meutes de chiens,
des coqs, des ânes, des cochons, des mulets, à des taureaux, des vieux chevaux,
des sangliers et même des ours !
Les parisiens, dit-on, en étaient friands.
Cependant, ces spectacles violents et douteux n’étaient pas
du goût de tout le monde (on peut d’ailleurs se dire qu’une telle chose est
impensable et que cette société ne faisait pas preuve de beaucoup d’éthique).
Le 9 Juin 1792, le Procureur Général du département
s’indigne devant de telles atrocités. Il adresse une lettre au Directoire du
district de Saint-Denis :
« On vient de me
dénoncer, messieurs, un spectacle déchirant qui se donne à Belleville certains
jours de l’année, et où l’on fait périr un taureau dans les tourments les plus
cruels. Je ne doute pas que la lecture de cette lettre, dont copie est
ci-jointe, ne vous détermine à prendre des mesures pour que ce spectacle n’ait
plus lieu. »
L’injonction est respectée mais sur une courte durée.
D’ailleurs, en 1819, le Conducteur des Etrangers à Paris (une
sorte de manuel touristique décrivant Paris et ses abords pour les étrangers)
signale ces combats en émettant clairement leur opposition à ses lecteurs.
Le Préfet de la Municipalité également défavorable à ces
combats, écrit, afin de « prendre des mesures pour que ce spectacle n’ait
plus lieu ».
Malheureusement, depuis le 1er Février 184O, le
Conseil de Belleville avait autorisé au bureau de bienfaisance de percevoir le
droit pour les pauvres appelé également le droit des indigents (impôt prélevé
sur les recettes des spectacles au profit de l’Assistance Publique), ce qui
implique que chaque spectateur payait une taxe qui serait reversée aux pauvres…
et on en avait besoin. De plus, ces combats étaient rentrés dans les mœurs, il
y avait très peu de moyens de divertissement et celui-ci en était un qui avait
beaucoup de succès.
C’est dans un tel contexte que les spectacles furent difficiles
à interdire.
Néanmoins, le 23 Mai 1853, on vota l’interdiction définitive
des spectacles de combats. On demande également le changement du nom de la
porte rappelant ce spectacle sinistre et sanguinaire perçut désormais comme
insoutenable puisqu’il n’est plus « dans nos mœurs ni dans les idées
actuelles de l’état social français ».
L’interdiction totale des combats se fera véritablement en
1883.
La place du Combat porta ce nom jusqu’en 1945 pour devenir,
comme actuellement, la Place du Colonel Fabien.
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